Katerine


Masculin-féminin
singulier


Considéré à l’époque de son premier mini-album Les mariages chinois comme une curiosité plaisante mais anecdotique, Philippe Katerine est en passe de devenir l’une des valeurs sûres d’une nouvelle scène française, aux côtés d’artistes comme Silvain Vanot, Miossec, ou son ami Dominique A. Avec son troisième opus, Mauvaises fréquentations, l’auteur de Comme Jeanie Longo - sorte d’équivalent français du Velo(city) girl de Primal Scream - creuse son sillon en profondeur, sans pour autant se départir de son habituelle désinvolture. Certains détracteurs férus de SF pourront bien le surnommer “ Philippe K : tics “, ses concerts en solo ou en trio ont déjà dû convertir tous ceux dont le coeur balançait encore. De la Vendée au Japon en passant par l’Amérique latine et... Copenhague, le sémillant Philippe dévoile un peu de la vie de Katerine.




A l’anglaise ?
Musicalement, les Beatles et, plus loin, les Pastels ou Jesus and Mary Chain m’ont considérablement influencé. Ce sont des groupes que j’ai beaucoup écoutés, comme d’autres nettement plus obscurs. “L’éducation anglaise”, ça peut être ça, mais aussi d’autres choses : le cinéma - Ken Loach, par exemple -, la règle sur les doigts, des rapports amoureux sado-masochistes... C’est assez large.




Guitare latine ?
J’ai une technique de guitare assez particulière. J’ai appris avec un voisin qui jouait essentiellemnt de la musique espagnole ou hispanisante. Il m’a montré comment placer mes doigts et maintenant, j’ai beaucoup de mal à jouer autrement. Le pouce joue sur les cordes graves de mi ou de la, tandis qu’avec les trois autres doigts, on joue sur les aiguës. C’est une technique bossa nova par essence, mais moi j’ai toujours cru qu’on jouait de la guitare comme ça. Ma musique n’est pas de la bossa nova, évidemment, ça n’aurait pas de raison d’être. C’est juste une couleur, une rythmique, une harmonique qui me sont venues comme ça et que j’ai cultivées par inadvertance.





Ce style est très présent sur L’éducation anglaise, mais sans que ce soit prémédité. C’est comme le fait d’écrire des morceaux courts, ce n’est pas réfléchi, ça vient comme ça. J’essaie de me poser le moins de questions possible. On m’a dit que ce que je faisais, c’était du “folk français”, de la variété, de la “nouvelle chanson française”, ou même du punk-rock ! (rires) Toutes ces définitions sont acceptables, après tout. (Katerine reprend parfois sur scène Johnny Thunders et les Jesus and Mary Chain. En acoustique, évidemment)




Le public
J’aime quand il y a un public varié, comme c’était le cas au Festival à la Campagne : des gens de quarante ans, des enfants, des sexagénaires, même... Des gens qui n’étaient jamais venus à mes concerts et qui se sont retrouvés là, des gens qui ne partagent pas forcément les mêmes références culturelles. Si je joue en acoustique, ce n’est pas pour attirer un public qui ne s’intéresse pas au rock, mais c’est vrai que ça peut aider.




Didier Sustrac
C’est drôle que vous trouviez des affinités entre sa musique et la mienne car, lors d’une tournée avec Dominique A, l’ingénieur du son m’appelait toujours Didier Sustrac (rires). Je connais juste un morceau, “Tout ça les hommes”, quelque chose comme ça (il chantonne). J’avais entendu ça à la radio, c’avait même été un tube, toutefois je n’avais pas été jusqu’à acheter le disque ! (rires) Mais ça ne me dérange pas que vous me compariez à lui. après tout, pourquoi pas... Il y a sans doute des similitudes dans les accords de guitare. Ca ne me poserait pas problème d’être dans la même playlist que lui.




Big in Japan ?
Je trouve ça incroyable, fabuleux que moi, en Vendée, sans rien faire, je puisse vendre 20000 disques au Japon ! Pour moi, c’est un phénomène, mais finalement ce n’est pas si étonnant. Les jeunes Japonais sont fascinés par tout ce qui tourne autour de la Nouvelle Vague. Godard est quelqu’un de connu là-bas, et le public ressent peut-être, en écoutant ma musique, que j’aime bien une certaine culture française, des gens comme Godard, justement, ou Brigitte Fontaine, Gainsbourg, Jacques Demy... Sans le savoir, nous avons de nombreuses accointances culturelles. Et puis aussi, je cite souvent Paris, la Tour Eiffel et, apparemment, les Japonais aiment beaucoup ça.




...à la campagne
Je suis encore un peu dans l’amateurisme, je n’ai donc pas à téléphoner tous les jours à Paris ou à m’y rendre souvent. Finalement, c’est un avantage de vivre à la campagne. Ainsi, j’évite de parler tout le temps de musique, de toujours voir les personnes avec qui je travaille. Et j’arrive mieux à composer chez moi ; à Paris, je vais au cinéma, dans les bars, je suis tout le temps ailleurs.




Ma voix
Je ne l’aime pas, mais j’ai fini par m’y habituer. J’ai accepté ses faiblesses et ses qualités. En fait, je la réécoute très peu, le moins possible. J’essaie de faire avec, c’est tout.


Propos recueillis par
Fabien Cavanna
Florent Christiansen
Vincent A.